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Shew In The Place To Be Around The World!
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12 février 2009

Rapport Banque Mondiale

Guatemala City, le 11 février 2009

Rapport sur la présentation de l’évaluation de la Banque Mondiale « Guatemala, Evaluación de la Pobreza : Buen Desempeño a Bajo Nivel »

9 février 2009 

Intervenants :

Karin Slowing, Secrétariat de la Planification et Programmation (SEGEPLAN)

Pamelo Cox, Vice-présidente de la Banque Mondiale

John Newman, Economiste de la Banque Mondiale

Jorge Lavarreda, Centre d’Investigations Economiques Nationales (CIEN)

Wilson Romero, IDIES

Juan Alberto Fuentes, Ministre des Finances Publiques

L’enquête effectuée par la Banque Mondiale, intitulée « Guatemala, Evaluation de la pauvreté : bons accomplissements à bas niveau », se base sur deux études menées dans des foyers guatémaltèques, l’une en 2000 et l’autre en 2006. Le fait que pour la première fois il existe deux sets de données comparables a permis la réalisation de cette évaluation sur la pauvreté dans le pays.

Depuis 1996 et les accords de paix, il y eut des efforts de la part des gouvernements successifs pour lutter contre la pauvreté - du moins dans la théorie. D’ailleurs l’un des objectifs du millénaire était de réduire de moitié le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté d’ici 2015. Dès lors, plusieurs travaux ont été entrepris qui ont permis principalement l’identification des victimes de la pauvreté. Cependant, de véritables progrès quant à la réduction du nombre de personnes touchées n’ont pas été constatés car il y a un cruel manque d’implémentation de politiques publiques. En définitive, à moins d’une impressionnante action gouvernementale d’ici 2015, l’objectif du millénaire ne sera jamais atteint et le mieux que l’on pourra espérer est une réduction de l’ordre de 10%.

Quelles sont donc les observations faites par la Banque Mondiale dans son rapport ? Tout d’abord, il est expliqué que même si aucun changement n’a été constaté quant au nombre de personnes en situation de pauvreté extrême, soit 15% de la population, la pauvreté totale a reculé de cinq points entre 2000 et 2006, en passant de 56.2% à 51.0% de la population guatémaltèque. Cependant, les améliorations n’ont pas été uniformes à travers le pays et la population. Effectivement, un net progrès a été constaté parmi les non indigènes, rien chez les indigènes ; la pauvreté a reculé de quatorze points dans la région Sudoriente mais augmenté de onze points dans le Nororiente. Une fois de plus, cela démontre qu’il existe d’importantes inégalités dans la société guatémaltèque.

Comme le souligne le rapport, ce qui a largement contribué à l’amélioration financière d’un bon nombre de Guatémaltèques est l’augmentation des remesas[1] qui constituent maintenant le 10% du PIB. Il a aussi été relevé que les foyers ayant réussi à améliorer leur situation sont ceux qui ont diversifié leurs sources de revenu. Pour continuer dans le domaine des avancées, on peut relever que le PIB du pays a augmenté de 18%, plus d’enfants sont scolarisés (en 2000, 79.9% des enfants étaient immatriculés dans le primaire et 26.0% dans le secondaire ; ces chiffres grimpent à respectivement 86.4% et 37.5%). De même l’espérance de vie a augmenté de 3%, passant de 67.9 à 69.9 ans, et la mortalité infantile a chuté de 22%.

Toujours est-il qu’il reste un point sur lequel aucune amélioration n’a été constatée : le problème de la dénutrition. La raison pourrait être la même que celle qui explique l’absence d’amélioration quant au niveau de pauvreté extrême, soit l’augmentation qu’ont connue les aliments au cours de ces dernières années. Les foyers vivant dans des conditions de pauvreté extrême dépensant leur argent uniquement dans des denrées alimentaires, la hausse des prix de l’alimentaire a eu d’importantes répercussions pour eux. L’autre élément pouvant expliquer ce problème est le fait qu’il y a peu de dispensaires ou d’installations médicales en général, surtout dans les régions particulièrement isolées. Ainsi l’information et la prévention quant à la dénutrition n’atteignent pas ces populations.

La substance même du propos de la Banque Mondiale dans cette évaluation, propos illustré par le titre « bons accomplissements à bas niveaux », est que, certes, les indicateurs sociaux du pays se trouvent à un niveau très bas, mais les considérer seuls, hors contexte si l’on veut, brosserait un portrait trop pessimiste de la situation guatémaltèque. En effet, si on observe ces chiffres seuls au moyen de l’indice de Gini, le Guatemala se trouve dans le septante-cinquième centile, ce qui signifie que septante-cinq pour cent des pays ont des indicateurs sociaux de meilleur niveau. Cependant, si on observe les progrès réalisés par le pays, soit le pro médio annuel de l’indice de Gini illustrant les changements dans le pays, le Guatemala est propulsé au vingt-cinquième centile ce qui signifie que seuls vingt-cinq pour cent des pays ont connu une meilleure évolution. Ainsi, en considérant les avancées faites dans le pays, notamment dans l’accès à l’eau ou encore la mortalité infantile, cela permet de nuancer l’image sombre du pays. Ainsi, ce rapport tient lieu de félicitation pour le gouvernement pour ses avancées, même si les indicateurs sociaux restent à un niveau très bas.

Le gouvernement guatémaltèque ayant mis sur pied un programme de transfert monétaire conditionné du nom de « Mi Familia Progresa », le rapport explique comment améliorer celui-ci, en ciblant mieux les bénéficiaires.

Le rapport tente aussi d’identifier quels sont les éléments qui font que la diminution de la pauvreté n’a été que de cinq points. Deux explications sont avancées : d’une part, les infrastructures guatémaltèques sont encore très peu développées ce qui n’encourage pas les entreprise à s’implanter dans le pays, d’autre part, la main d’œuvre reste encore largement sous-qualifiée.

Ce qui me dérange dans le propos tenu dans ce rapport est le fait qu’on considère que le pays part d’un niveau tellement bas (jusque dans les années nonante, en Amérique Latine seul Haïti se trouvait à un niveau plus bas que le Guatemala) que cela justifie qu’à l’heure actuelle, les indicateurs sociaux restent à un niveau très bas. Faudrait-il donc se complaire dans cette situation et s’estimer heureux parce que cela a déjà été pire? D’autant plus que même John Newman, l’un des artisans de ce rapport a lui-même mis en avant le fait que ces avancées demeurent fragiles et que la pauvreté pourrait donc facilement augmenter à nouveau.

Qui plus est, comme l’a relevé Jorge Lavarreda, l’amélioration du niveau de vie d’un grand nombre de foyers provient des remesas et non pas d’un développement ou d’avancées endogènes. Or, au vu de la crise économique mondiale, on s’attend à ce que ce revenu-là diminue au courant des prochains mois. Cela risque d’accroître fortement la pression sur les foyers guatémaltèques et de permettre à la pauvreté de gagner de nouveau du terrain.

Enfin, Wilson Romero mit en avant une dernière contradiction. La Banque Mondiale se félicite dans son rapport de la diversification des sources de revenus des foyers guatémaltèques. Cependant, la plupart du temps, cette diversification implique qu’une seule et même personne cumule jusqu’à quatre emplois différents. Ainsi l’amélioration des revenus du foyer passerait par la détérioration de la qualité de vie d’au moins l’un de ses membres. 

Lors de la présentation des recommandations du rapport, John Newman s’est principalement – pour ne pas dire exclusivement – focalisé sur la nécessité pour le gouvernement guatémaltèque d’établir un plan d’urgence avant que la crise économique mondiale ne se fasse réellement ressentir dans le pays, sans quoi la pauvreté risquerait d’augmenter à nouveau. Je trouve regrettable qu’il n’ait pas évoqué les quelques recommandations développées dans le rapport afin de parvenir à diminuer la pauvreté (amélioration du système d’information, coordination du programme de transfert monétaire conditionné avec d’autres programmes sociaux, développement d’un système de protection social à l’encontre des populations les plus vulnérables, etc.)

En définitive, on peut regretter le consensualisme du rapport de la Banque Mondiale. En effet, lors de la présentation du rapport, l’impression qui s’en dégage est celle qu’il ne faut pas froisser. Les points positifs sont extrêmement bien mis en exergue, ce qui n’est pas le cas pour les points négatifs qui sont eux plus rapidement mentionnés. Certes, la Banque Mondiale émet quelques recommandations mais cela reste relativement basique. En somme, je trouve ce rapport plutôt décevant.

Stéphanie Eller

Stagiaire

[1] Argent envoyé par les Guatémaltèques de l’étranger, principalement des Etats-Unis.


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